Oleïa Yoga
Philosophie
Miel de nuage
Tout au long du cours, l’attention est portée sur l’apprentissage de l’harmonisation du mouvement en accord avec la respiration, l’alignement dans les postures, l’attention, l’écoute, la présence à soi et la relaxation. Les vibrations du bol tibétain, le parfum de l’encens, des huiles essentielles et la musique aux sonorités de flûte indienne vous feront voyager depuis votre tapis vers l’Inde, au coeur des terres sacrées yogiques de l’Himalaya. Le cours est une méditation en soi, une invitation au voyage intérieur, à l’exploration de son paysage, de ses couleurs, de sa vérité.
Lorsque nous nous laissons happer par l’agitation et la précipitation, lorsque nous focalisons constamment notre attention sur l’extérieur, sans prendre le temps de respirer, lorsque nous nous tenons à l’écart du silence, tant de choses nous échappent. Ici, on vient s’enraciner dans son être, on observe avec détachement le flot de l’agitation quotidienne suivre son cours, on tourne son regard vers l’intérieur. L’intervalle entre l’inspiration et l’expiration est le temps de la contemplation.
Je vous accompagne en guidant votre attention vers vos ressentis. Au fil de la pratique, on prend conscience que chaque posture fait émerger des pensées ou émotions différentes. Tout ce que l'on vit sur un tapis de yoga a des résonances avec ce que l'on vit à l'extérieur dans notre vie quotidienne. C’est un moment d’intimité, un exercice d’introspection, un moment précieux pour ralentir, se retrouver, prendre soin, cultiver, nourrir le lien avec soi-même, recréer de l’espace à l’intérieur, s’écouter, explorer nos profondeurs. Et si ce que nous vivions à l’extérieur n’était que le miroir de notre intérieur, des projections de la relation que nous entretenons avec nous-mêmes ? Le yoga n’est pas un exercice de performance ou de compétition mais l’apprentissage du chemin de la non-violence, du respect et de la bienveillance envers soi, un chemin de douceur dans la fermeté ou de fermeté dans la douceur.
Médite sur l’Inconcevable,
Sur le Poète Primordial
Et Bon, plus petit qu’un atome,
Aussi radieux que le soleil.
— Bhagavad Gîtâ, VIII, 9
En Corps
En apparence la présence répétée de certaines postures au fil des séances pourra sembler monotone. Ceci n'est qu'en apparence. A l'intérieur, le vécu dans la posture sera à chaque fois nouveau, tout est mouvance et à chaque élan du souffle, la vie se renouvelle. Sur un tapis on prend conscience de la vie qui circule en nous. C'est une temporalité où l'on prend plaisir à se (re)découvrir, autrement. Pour cette raison, j'attache de l'importance à maintenir une certaine routine pour garantir une continuité entre les séquences tout au long de l'année. Pour plusieurs raisons, tout d'abord parce que le mental a plus de facilités à lâcher-prise lorsqu'il reconnaît un cadre dans lequel il se sent en sécurité, il peut alors se laisser porter. L'autre point primordial à mes yeux c'est qu'évoluer en yoga c'est aussi gagner en qualité de perception : qu'est-ce qui est mouvant, vivant, à l'intérieur de moi au sein de cette constance, de cette régularité, de cette même posture pratiquée de manière répétitive ? Ecoutez tous ces changements de température, ces nœuds, ces tensions, ces frissons, ces vibrations, ces battements, ces fourmillements, ces essoufflements, ces relâchements. Le corps possède son propre langage, encore faut-il s'accorder le temps de ralentir pour écouter les messages qu'il exprime. Le corps a énormément de choses à dire. Parfois c'est comme s'il savait mieux que nous. Il s'agit alors de progressivement se détendre et s'ouvrir, petit à petit laisser fondre les rigidités, ces voilages qui nous donnent l'illusion d'une séparation. Pour laisser advenir cette parole du corps : organique, intuitive et émancipatrice. Ne faire plus qu'un avec elle, la laisser vibrer et chanter haut et fort dans, et avec, le monde.
C’est le dharma de l’herbe de croître,
et celui du soleil de briller.
— Bhagavad Gîtâ
Flottant
Au fil du temps, on prend conscience que lorsque l'on commence à se sentir confortable dans une posture, il existe une variation plus complexe, qui nous amènera de nouveau à goûter à l'inconfort. Tout est là : être en paix avec l'impermanence, ces va-et-vient, cette mouvance continuelle, apprendre à ne pas s'attacher à ce qui n'est plus, accepter ce qui est, tel que nous le propose la vie et être en capacité de recontacter nos ressources intérieures, même dans les situations les plus inconfortables de l'existence. Apprendre à traverser les tourments de la vie en cultivant un sentiment de calme et de sérénité, profond. Prendre conscience que cette paix intérieure, lorsqu'elle repose sur des fondations solides, peut être parfois ébranlée mais jamais atteinte. C'est aussi apprendre à savourer le chemin, accorder moins d'importance au but qu'à la joie de cheminer, savourer de ne pas tout savoir, de ne pas tout maîtriser, accueillir notre vulnérabilité, notre humanité.
Il ne faut pas demander que les événements arrivent comme tu le veux, mais il faut les vouloir comme ils arrivent ; ainsi ta vie sera heureuse.
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Il y a ce qui dépend de nous,
il y a ce qui ne dépend pas de nous.
— Epictète, Le Manuel
Si tu comprends, les choses sont comme elles sont. Si tu ne comprends pas, les choses sont comme elles sont.
— Proverbe zen
Il fait ciel
Le yoga ne remplace pas une psychothérapie, la médecine ou la kinésithérapie, il avance main dans la main avec elles, il aide à maintenir souplesse et clarté mentale. Il aide à prendre de bonnes décisions, celles qui nous mèneront à nous poser les bonnes questions pour cheminer vers la vie qui nous fait sentir le plus vivant chaque jour.
Le lotus préfère s'épanouir au soleil et mourir, plutôt que de vivre en bouton un éternel hiver.
dans nos soleils
Le yogin, lorsqu’il passe d’une posture à l’autre avec grâce et fluidité, avec une attention et une respiration profondes, sans devancer le résultat, détaché de l’accomplissement, de la réussite ou de l’échec de son exercice, tente de transposer cette attitude dans sa vie quotidienne, dans ses relations aux autres et à son environnement. Comme la posture qui semble au début être une contrainte que l’on impose à son corps de manière extérieure, avec la patience et l’assiduité dans l’exercice, elle devient agréable, reposante, fortifiante. C’est ainsi que le yogin peut tenter d’aborder les difficultés, comme des moments opportuns et une chance pour reconnaître la vie elle-même dans tout son éclat, en gardant à l’esprit qu’il n’est pas en son pouvoir de les contrôler mais les reconnaître comme des passages qui peuvent être apprivoisés dans une attitude de présence. Il peut donc expérimenter les postures, comme des métaphores des contraintes de la vie car, malgré leur difficulté aux niveaux corporel et mental, elles peuvent permettre de méditer longtemps et suivre en accord le mouvement de l’esprit, avec discernement, équanimité et même avec émerveillement, le même qui est à l’origine de l’attitude philosophique.
Celui qui pratique cet exercice de la concentration voit l’univers avec des yeux nouveaux, comme s’il le voyait pour la première et dernière fois : il découvre, dans la jouissance du présent, le mystère et la splendeur de l’existence, du surgissement du monde, et en même temps, il atteint à la sérénité en éprouvant à quel point sont relatives les choses qui provoquent le trouble et l’inquiétude. De la même manière également, les stoïciens, épicuriens et platoniciens invitent, pour des raisons différentes, leurs disciples à se hausser à une perspective cosmique, à se plonger dans l’immensité de l’espace et du temps, et à transformer ainsi leur vision du monde.
— Pierre Hadot,
Qu'est-ce que la philosophie antique ?
侘寂
Quintessence de l’esthétique japonaise, Wabi-Sabi exprime l'idée de la beauté des choses imparfaites, impermanentes et incomplètes, modestes et atypiques. C’est le renoncement à l’éclat. C'est la simplicité, la rusticité, les imperfections, les marques du temps, les asymétries, l'humilité. La grandeur réside dans les détails discrets et négligés.
wabi fait référence à la plénitude et la modestie que l'on peut éprouver face aux phénomènes naturels, et sabi, la sensation face aux choses dans lesquelles on peut déceler l’altération et le travail du temps.
Wabi-Sabi est imperceptible mais il est partout. C’est la mousse sur le rocher, le bois d’une porte qui craquèle, une fissure dans un mur, une ride sur un visage. C’est cette tasse déformée ou ce paysage brumeux. C’est le reflet de la lune sur l’étang ou bien le son de la rivière qui s’écoule. Il illustre de nombreux principes spirituels et philosophiques du bouddhisme zen : contemplation, humilité, discrétion, sérénité, simplicité et détachement. Ses préceptes philosophiques sont simples : se défaire du superflu, accepter l’inévitable et l’impermanence, ne pas chercher la perfection. On peut l’entendre comme une appréciation d’une beauté vouée à disparaître voire d’une contemplation fugace de quelque chose qui devient beau en vieillissant, en s’abîmant, qui par ses défauts naturels acquiert un charme nouveau.
Il fait toujours beau au-dessus des nuages
Mais moi je suis de ces oiseaux qui nous font danser sous l'orage
Je traverserai tous les nuages pour trouver la lumière
En chantant sous la pluie, la symphonie des éclairs
— Zaho de Sagazan, La symphonie des éclairs